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« le cèdre et l’ancolie », une lecture de Stéphan Causse

Une écriture de la transfiguration


Prenez les poèmes. Mieux — approchez-vous de très près. Vous aurez alors une idée de la manière dont la lumière vit dans ce jardin. C’est la vie immédiate dans les herbes :


« dans les herbes s’effacent/le oui le non », « d’un pas j’efface la nuit », « un mot puisé noir/danse sur tes paupières », « au creux de l’herbe/toute une nuit, tout un matin », « je mâche une prière d’herbe », « au clapot des mots noyés/s’ouvre ton visage » ou encore « l’eau/des choses sans ombre ».

On lève ou on baisse les yeux dans cet air bleu qui traverse les ombres de l’existence. Deux gardiens du temple : le cèdre et l’ancolie. Le géant et la petite délicate qui s’épanouissent dans ce lieu ouvert et fixe. Ces deux-là ont toujours été là avec leurs noms, en attendant le poète qui les appelle du regard. Rien ne vieillit dans l’écriture, rien ne vieillit dans ce jardin, et on peut comprendre ces « trois âges vont dans le soir », non pas comme une chronologie du temps, mais bien comme une suspension où d’abord, ensuite et enfin se confondent.

le cèdre et l’ancolie sollicite par son jaillissement la nécessité d’attacher son regard à des choses simples et immédiates : « deux abeilles longtemps/ont cherché leur soleil » ou « les bourdons plongent/aux fourreaux mauves ». Les mots font entendre la revendication discrète des choses les plus intimes — sombres parfois, néanmoins c’est la clarté qui fortifie toujours son propos, on est emporté par le souffle de ses signifiants : «  ici toute l’herbe a ton sang ».

Des échappées belles, une vibration des éléments, un secret des signes tout au bout du recueil, si on consent à le relire. Si on désire marcher dans ce jardin, un sentiment de l’origine advient, un sentiment de l’avant du paysage où le sauvage parlait encore une langue étrangère. Cécile Boisson cultive son jardin. Le temps de la lecture s’étire dans son impensable bonheur. Stéphan Causse, 2014, tous droits réservés.



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